Downtown Uptown Genève est spécialisé dans la revente de vêtements et de chaussures. (Photo: Enrico Gastaldello)
C’est un marché qui n’en finit plus de croître: en 2020, le luxe de seconde main pesait quelque 28 milliards d’euros à l’échelle mondiale, selon un rapport de Bain & Company.
La multiplication des plateformes et la création d’espaces dédiés dans des magasins a accéléré la tendance.
Dans les années 1980-90, les articles de mode et de luxe déjà portés intéressaient surtout les collectionneurs. Mais les temps ont changé, en particulier depuis que le vent d’internet a soufflé: à la fin des années 2000, ont commencé à émerger des sites de revente en ligne d’articles de luxe d’occasion.
Aujourd’hui, l’industrie du luxe neuf pèse entre 250 et 295 milliards par an, selon Bain & Company, l’un des cabinets de référence en la matière.
Mais pour le spécialiste Serge Carreira, maître de conférence à Sciences Po et responsable «Initiative marques émergentes» à la Fédération de la haute couture, «c’est la dynamique, très vive» du luxe de seconde main «qui est intéressante”: ce marché progresse en effet plus vite que le luxe de première main.
Et même quatre fois plus vite, selon un rapport du Boston Consulting Group, qui souligne que les plateformes digitales génèrent 25% des ventes globales du luxe d’occasion.
La seconde main se lance sur le web
A la fin des années 2000, de nouveaux acteurs intègrent le marché de la seconde main et lancent une nouvelle offre sur le web. L’idée est alors de proposer des pièces de collection de grandes maisons mais aussi du prêt-à-porter griffé, comme Isabel Marant, MaxMara ou Zadig et Voltaire.
En France, Vestiaire Collective est pionnier dans le domaine et connaît, depuis sa création en 2009, un franc succès. L’entreprise est valorisée à 1,45 milliard d’euros et 25.000 nouveaux articles sont mis en ligne chaque semaine.
Coté en Bourse, l’américain The Real Real, né en 2011 et basé à San Francisco, est un autre grand acteur de la seconde main.
Au mitan des années 2010, les plateformes spécialisées se multiplient. Collector Square ouvre en 2012, avant ByLuxe (devenu Monogram) en 2015, puis le site CrushOn est lancé en 2018. Ces sites web ouvrent également des magasins: Monogram a un dépôt dans le XVIIème arrondissement de Paris et Collector Square détient un showroom boulevard Raspail.
Les grands magasins s’engouffrent dans la brèche
Le dynamisme du secteur attire les grands magasins. Collector Square se lance ainsi au Bon Marché Rive Gauche en octobre 2020.
Les Galeries Lafayette, boulevard Haussmann, ouvrent le 14 septembre 2021 un espace de 500 mètres carrés dédié à la seconde main et à la «mode responsable», accueillant des marques comme Monogram, Personal Seller ou CrushOn.
Huit jours plus tard, c’est au tour du Printemps, à quelques pas, d’ouvrir un étage entier pour la seconde main, le «7ème Ciel», davantage dévolu au grand luxe, avec notamment une partie regroupant des pièces signées de grands créateurs.
Timidité des créateurs et maisons du luxe
Dans le luxe en revanche, les exemples de marques ou groupes s’impliquant sur ce terrain sont assez peu nombreux.
Parmi eux, Isabel Marant a lancé son site «vintage» pour vendre et acheter des articles de seconde main de la marque. Stella McCartney en 2018 et Gucci en 2020 ont noué des partenariats avec The RealReal pour assurer la vente de leurs pièces d’occasion. Et le groupe Kering (Gucci, Saint Laurent, Balenciaga, Boucheron) participe à hauteur de 5% au capital de Vestiaire Collective.
Le marché du neuf et de l’occasion de luxe restent néanmoins très liés, estime Serge Carreira: «les tendances de la seconde main suivent celles de la première main. Par exemple, Dior est très populaire aujourd’hui. En conséquence, un des articles d’occasion les plus demandés est le sac Saddle des années 1990» de la maison Dior.
https://www.bilan.ch/story/le-luxe-doccasion-dinternet-aux-grands-magasins-387091240750